Enoncé du problème
14 avril 1858 : Gaspard TOURLAQUE et Marie Joséphine LAILLET se marient à Aboncourt, petit village de Haute-Saône. Gaspard, 29 ans, est fils de Pierre et de Louise DUNAUX, décédés du choléra (cf article), respectivement le 11 août et 29 août 1854, Il est noté dans l’acte de mariage que « lesdites naissances et décès [sont] constatés par les registres de l’état-civil de cette commune que nous avons sous les yeux ». Or, en marge de l’acte de mariage susmentionné (ABONCOURT 1853/1862 NMD – p. 55/112), on trouve une annotation qui semble pour le moins contradictoire avec l’acte de mariage…
Cette annotation semble incompréhensible puisqu’elle vient contredire l’acte de mariage lui-même qui indique le lieu de décès des parents de l’époux. Et on ne peut imaginer à notre époque avoir besoin de se préoccuper du sort des grands-parents quand il s’agit d’un mariage entre personnes consentantes et majeures.
Et pourtant, et pourtant… il s’agit bien là des grands-parents dudit Gaspard TOURLAQUE…
Solution du problème
La réponse nous est donnée par Maurice Garden, dans son ouvrage “Un historien dans la ville” (1), chapitre intitulé “Mariages parisiens à la fin du XIXème siècle : une microanalyse quantitative” :
En règle générale, personne, même s’il est majeur, même s’il est veuf ou divorcé, ne peut contracter union sans le consentement de ses parents. Cela signifie que tout nouvel époux doit prouver que ses ascendants sont vivants ou décédés. S’ils sont vivants, ils doivent obligatoirement « consentir » au mariage de leur fils ou de leur fille, quel que soit son âge. Leur consentement peut être direct, assuré par leur présence physique à la cérémonie du mariage et leur signature sur le registre des actes ; il peut être remplacé par un acte notarié adressé à la mairie qui affirme leur consentement. Si les deux parents d’un nouveau conjoint sont décédés (ce que prouve un double de leur acte de décès), il faut encore faire la preuve qu’aucun aïeul ne survit : si c’est le cas (et l’acte de décès des parents sert de preuve pour connaître la survie ou le décès de leurs parents, ce qui n’est pas toujours observé), l’officier d’état civil doit exiger le consentement de tout aïeul paternel ou maternel survivant, soit par sa présence effective, soit par un acte notarié. Le plus souvent, le maire se contente de la déclaration des époux et des témoins qui affirment “bien connaître le (la) futur époux (épouse), et que tous leurs ascendants sont décédés, mais qu’ils ignorent la date et le lieu de leur décès”.
(1) Garden, M. 2008. Un historien dans la ville. Éditions de la Maison des sciences de l’homme. doi :10.4000/books.editionsmsh.9936